vendredi 13 mars 2009

LES TITRES CHUTENT EN BOURSE

La grande glissade boursière s'accélère encore pour les groupes de médias européens. Jeudi 12 mars, le titre du groupe Lagardère plongeait de 15 %, à 20,61 euros. La veille, le numéro deux mondial de l'affichage et du mobilier urbain, JCDecaux, avait abandonné brutalement 18,69 %, à 8 euros. TF1 avait déjà subi le même sort quelques semaines plus tôt.

A chaque fois, les sociétés ont reconnu qu'elles étaient affectées par la baisse du marché publicitaire. Cette contraction soudaine a déjà fait sentir ses effets à la fin de l'année 2008, mais l'onde de choc est plus brutale encore en ce début d'année 2009. Surtout, ces groupes de médias concèdent qu'ils "naviguent à vue", ayant perdu toute possibilité de faire de véritables prévisions.

"Pour la première fois dans l'histoire du groupe, la croissance interne du chiffre d'affaires en 2009 sera négative", a ainsi déclaré Jean-Charles Decaux, le président du directoire de JCDecaux. Pour le premier trimestre de cette année, il anticipe déjà une baisse de l'activité de 10 %. Nonce Paolini, le patron de TF1 a estimé pour sa part le recul de son chiffre d'affaires à 9 % sur l'année 2009, après une baisse de 5,3 % l'année précédente. Son grand rival, le groupe M6, table sur un recul des recettes publicitaires de 7,5 % à 8 % au premier trimestre, et de 13 % sur la seule chaîne M6. "Il n'y a aucune visibilité pour 2009", a ajouté son patron Nicolas de Tavernost.

Une tendance confirmée par le patron de la maison mère de M6, le groupe audiovisuel européen RTL, Gerhard Zeller, qui a déclaré : "Etant donné l'état actuel des marchés publicitaire et les cycles de réservations à très court terme, il est impossible de donner une prévision annuelle fiable." Des déclarations qui ont refroidi les investisseurs et ont confirmé le passage dans le rouge des indicateurs du marché publicitaire.

SOMBRE CONTEXTE

Crise financière, ralentissement économique, baisse de la consommation des ménages : ces signaux inquiétants ont contraint nombre d'entreprises à revoir leur stratégie d'investissement. Et les budgets publicitaires et marketing n'échappent pas à la règle. Au gré des reports ou des réductions de campagne promotionnelle, les prévisions du marché publicitaire ont été revus à la baisse.

En novembre 2008, FrancePub évoquait pour la première fois une baisse des recettes publicitaires des médias français en 2008. Le bilan publié par l'Institut de recherches et d'études publicitaires (IREP) et FrancePub l'a chiffrée à 2,2 %. Ces organismes se refusent à faire des prévisions 2009. Havas Media anticipe de son côté une baisse des investissements publicitaires de 6,9 % au premier trimestre. Tous les médias étant dans le rouge, sauf Internet qui continue à croître, même si le rythme s'est beaucoup ralenti, à + 8,6 %.

Mais la situation s'est dégradée plus vite et plus fortement encore sur d'autres marchés européens. "En Espagne, le premier marché à avoir décroché, la chute des investissements publicitaires a été de l'ordre de 40 % en février. Au Royaume-Uni, la baisse est de 20 % à 25 %", constate Dominique Delport, le directeur général d'Havas Media France.

Dans ce contexte sombre, les groupes de médias ont été contraints de déprécier des actifs. Et leurs résultats 2008 en ont été affectés d'autant. En 2009, l'heure est aux plans d'économie. Lagardère Active compte ainsi réduire ses coûts de 70 millions d'euros, TF1 de 60 millions, M6 de 28 millions et JCDecaux de 24 millions. L'afficheur réduit aussi ses investissements et a décidé de ne pas verser de dividende.

Chacun tente de préserver sa santé financière. Mais pour les plus touchés ou les plus fragiles, l'issue est incertaine. Le mouvement de consolidation devrait s'accélérer remodelant le paysage des médias en Europe et dans le monde. M. Zeiler, patron de RTL, a évoqué une combinaison des chaînes britanniques Channel 4 et Five. De son côté, JCDecaux se dit prêt, avec une ligne de crédit de 700 millions d'euros, à saisir toutes les opportunités.
Laurence Girard