jeudi 2 octobre 2008

OUVERTURE DES ETATS GENERAUX DE LA PRESSE



Voici l'intégralité du discours de Nicolas sarkozy .Nous attendons vos commentaires.



DISCOURS DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Ouverture des Etats Généraux de la Presse Écrite
Palais de l’Élysée – Jeudi 2 octobre 2008Madame la Ministre,


Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs les présidents, directeurs, représentants d’organisations professionnelles, de groupes de presse, de publications,
Mesdames et Messieurs les professionnels de la presse et des médias,
Mesdames et Messieurs les journalistes,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de vous accueillir au Palais de l’Élysée pour l’ouverture des Etats généraux de la presse écrite dont j’ai annoncé l’organisation avant les vacances d’été.
Depuis cette annonce, la plupart d’entre vous avez manifesté votre intérêt pour cette démarche et votre souhait d’y être associés.
La vérité, c’est que vous tous ici présents, journalistes, patrons de presse, imprimeurs, dépositaires, diffuseurs, vous attendiez ces Etats généraux, vous les réclamiez même, depuis longtemps. Chacun d’entre vous savait que c’était nécessaire, que c’était urgent, chacun d’entre vous avait bien conscience que le statu quo ne pouvait plus durer, que la crise s’aggravait d’année en année, cette crise qui est à la fois une crise structurelle, avec la révolution numérique, mais aussi et tout le monde le sait, une crise bien française : coûts d’impression et de diffusion élevés, faiblesse du réseau de distribution, manque d’assise financière des entreprises de presse, perte de confiance entre les journalistes et les lecteurs…
Le Chef de l’Etat, garant des institutions, se doit de veiller à ce que la presse dispose des conditions de son existence et de son développement.
La presse fait partie de l’équilibre des pouvoirs. Ce qui est mauvais pour elle, est mauvais pour la démocratie. La presse est un produit économique, elle obéit à la loi de l’offre et de la demande, elle doit être rentable. C’est encore le meilleur moyen pour elle d’être indépendante. Mais la presse n’est pas et ne sera jamais un produit comme un autre. Pour ce motif, elle ne peut être laissée aux seules forces du marché.
Au lendemain du scellement d’une loi constitutionnelle placée sous le signe d’une République exemplaire, notre pays poursuit donc sa marche vers une démocratie plus adulte, plus équilibrée, en réfléchissant au rôle que joue la presse dans une démocratie irréprochable, et en se donnant les moyens de le conforter.
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Les difficultés de votre secteur sont multiples, complexes, sensibles. Elles s’étendent, à des degrés certes divers, de nos grands quotidiens nationaux et régionaux à la presse magazine et spécialisée, dela presse papier à la presse numérique. Leur complexité résulte d’un enchevêtrement de problèmes accumulés au cours du temps et jamais réellement traités. Internet, les gratuits aggravent les problèmes. Ils ne les ont pas créés.
La crise financière pourrait nous inciter à reporter une fois de plus le changement. Je crois au contraire que, plus que jamais, elle le justifie.
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A plus d’un titre, l’Etat est dans son rôle en proposant et en organisant ces Etats généraux.
Chaque année, il consacre près d’1 milliard d’euros à la presse, environ 10% de son chiffre d’affaires.
Acteur majeur du dispositif, l’Etat doit être le premier à s’interroger, avec vous, sur l’efficacité de ces aides publiques.
Au sortir de la seconde guerre mondiale, l’Etat a également directement fixé les règles qui régissent la presse encore aujourd’hui. A l’époque, il l’a fait pour des motifs légitimes : le partage de la rareté du papier, des imprimeries et du transport, la disponibilité des rotatives, le pluralisme, la libre communication des idées tout comme la déontologie de l’information. Il a eu raison de le faire.
Mais l’environnement économique et sociétal de la presse a complètement changé. Il appartient dès lors à l’Etat de vérifier que les règles qu’il a créées atteignent encore le but qu’elles s’étaient fixées. Tel n’est pas le cas. Le dispositif de l’après-guerre, inspiré de l’idéal de la Résistance, devait favorise rune presse quotidienne d’information générale et politique florissante, indépendante et diversifiée. Or, jamais la presse quotidienne et généraliste ne s’est aussi mal portée qu’aujourd’hui.
Notre responsabilité, c’est bien sûr d’assurer les conditions nécessaires à l’existence d’une presse libre, indépendante, et pluraliste. La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 est venue nous le rappeler récemment.
Notre responsabilité, c’est aussi de veiller à la bonne santé économique d’un secteur qui fait vivre des dizaines de milliers de personnes, des centaines de PME, et qui contribue au bien-être de tous.
C’est pourquoi l’Etat fera ce qu’il a à faire. Il prendra ses responsabilités.
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Pour autant, chacun le sait bien ici, l’avenir de la presse relève en grande partie de votre responsabilité. Vos difficultés ne trouveront aucune solution si vous restez divisés, comme si souvent par le passé, au lieu de vous unir pour créer ensemble les conditions du changement.
C’est pourquoi, je ne veux en aucun cas que l’Etat décide à votre place, choisisse à la place de vos entreprises de presse. Il ne le pourrait d’ailleurs pas. Au contraire, j’ai souhaité que des Etats généraux associent l’ensemble des acteurs concernés dans une volonté commune de partager un diagnostic et de dégager des solutions. Je me réjouis de voir que c’est bien ainsi qu’ils ont été accueillis.
Dégager des solutions, c’est le but ultime des Etats généraux. Il ne s’agit pas seulement de faire remonter des doléances, même si cela a son importance. Il ne s’agit pas de rédiger un énième rapport sur le sujet, même si de très bons ont été écrits par le passé. Il s’agit de se mettre d’accord sur un certain nombre de changements à mettre en œuvre pour que la presse écrite française sorte des difficultés inacceptables qui sont les siennes depuis 30 ans et qui ne feront que s’aggraver si l’on ne fait rien.
Aujourd’hui, vous l’aurez compris, je veux vous tenir un langage de vérité. Car je pense que c’est faute d’avoir osé affronter la vérité que votre secteur est en crise.
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Bien sûr, il ne faut pas caricaturer la situation de la presse française. Les Français sont parmi les premiers lecteurs de magazine au monde. La presse quotidienne régionale et départementale a su préserver l’attachement de ses lecteurs grâce à une information de qualité, de proximité, et une distribution appropriée. Les sites d’information sur Internet sont parmi les plus consultés, traduisant une demande vive d’information et soulignant le rôle structurant des « marques » dans l’univers de la communication numérique.
De même, il ne faut pas sous-estimer les difficultés de la presse écrite dans les autres démocraties occidentales. Nous ne sommes pas les seuls, même si nous sommes parmi les plus gravement atteints.
Partout, dans le monde développé, la presse écrite est confrontée au triple impact de la révolution numérique : la culture de l’instantané, la culture de la gratuité, la transformation du marché publicitaire. Partout, la presse payante imprimée doit justifier sa raison d’être face à l’offre numérique exhaustive, mondiale, immédiatement accessible et en grande partie gratuite. Partout, les journalistes s’interrogent sur l’avenir de leur métier, sur le rôle de leur profession. De moins en moins collecteurs de l’information, ils se demandent, à l’heure des blogs et des sites participatifs, comment convaincre leurs lecteurs que leur médiation est encore utile, est encore nécessaire.
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Je tiens également à ce que le rôle des uns et des autres dans l’évolution de notre presse écrite depuis
30 ans ne soit pas contrefait ou stigmatisé : vilipender le Syndicat du Livre pour mieux passer sous silence la responsabilité des éditeurs est tellement habituel ; vitupérer contre les droits d’auteur des journalistes pour mieux jeter le voile sur les retards d’investissement dans le web est tellement fréquent ; critiquer les contenus et les choix éditoriaux pour ne pas parler de la fabrication ou de la distribution est tellement classique.
Les Etats généraux ne sauraient être ceux de l’invective, ni d’une vision univoque des problèmes. Ils doivent être ceux de la recherche – de bonne foi – de solutions communes. Les questions qu’ils ont à résoudre sont suffisamment sensibles et complexes pour qu’elles ne soient pas traitées dans l’excès, l’approximation, la caricature.
Sur ce sujet comme sur d’autres, nous ne partons pas d’une page blanche. En matière de presse, plus que dans bien d’autres secteurs, il serait illusoire de dire que l’histoire ne compte pas. Cette histoire, l’histoire particulière de chacun de vos groupes, de chacun de vos titres, nous voulons d’ailleurs qu’elles continuent. Vos cultures, vos traditions journalistiques, nous voulons qu’elles vivent. C’est pour cela qu’aux côtés des grands groupes, il faut préserver les conditions d’une presse autonome issue d’histoires collectives, individuelles ou familiales, qui font de votre secteur un patchwork d’aventures personnelles, de citoyens passionnés, de personnalités engagées.

Cela étant, fuir l’excès, la caricature, la simplification, sur lesquels on ne construit rien, ne saurait nous conduire à nous voiler une nouvelle fois la face devant l’étendue de la crise de la presse française. Baisse de la diffusion, baisse des recettes publicitaires, effondrement du marché des annonces, la presse ne peut faire face parallèlement aux 35 heures, à la hausse des salaires, à celle des matières premières. Attiré par Internet et par les gratuits, ou déçu par les contenus, le lectorat s’effrite et vieillit.
Quant à la presse numérique, elle ne constitue pas, pour le moment en tout cas, un modèle alternatif rentable. Comment le pourrait-elle alors qu’elle est gratuite pour le lecteur, beaucoup moins chère pour l’annonceur, et soumise à une concurrence sans limites ?
Au-delà de l’impasse économique, bien réelle pour beaucoup d’entre vous, c’est le modèle de l’écrit qui est en cause. Nous ne pouvons y être indifférents tant le rôle de l’écrit est nécessaire à la formation des consciences et à la structuration du débat public. Lire régulièrement un quotidien ou un magazine d’information générale et politique, c’est se mettre en situation de recevoir une information générale sur l’état de la société et du monde. C’est une démarche fort différente de celle qui consiste à chercher de l’information sur Internet au gré de ses envies, de ses besoins, de ses centres d’intérêt.
Nous devons préserver et faire vivre ce désir d’information générale, cette éducation citoyenne au long cours. C’est à vous de le faire en travaillant sur les contenus. C’est à nous de vous y aider en créant les conditions d’un modèle économique qui vous permette d’en vivre.
Ce qui a fait et fera toujours la presse, ce qui lui donne et lui donnera toujours son indépendance, ce qui fait qu’elle a des investisseurs, qu’elle est respectée, qu’elle participe au débat démocratique, c’est qu’elle est lue.
Pour cela, elle a besoin d’investir : investir dans des lectorats, investir dans des projets éditoriaux, investir dans des réseaux et des modes de distribution, investir dans des sites numériques, investir dans des rédactions solides, capables de pourvoir aux besoins d’une information d’analyse et d’investigation, vérifiée, hiérarchisée, courageuse et libre.
Or la ligne de plus grande pente de la presse, plus particulièrement celle de la presse d’information politique et générale, la ligne qu’il nous faut combattre, qu’il nous faut redresser, c’est la paupérisation. Paupérisation des contenus quand moins de 20% des prix de vente leur sont consacrés.
Paupérisation des rédactions quand des plans sociaux assèchent les journaux de leur raison d’être, le journalisme. Paupérisation des réseaux avec la disparition d’un trop grand nombre de correspondants étrangers. Paupérisation de la profession avec des journalistes mal payés, mal outillés, précarisés.
Paupérisation des entreprises de presse avec insuffisamment de fonds propres pour investir, innover, préparer l’avenir.





L’enjeu central des Etats généraux, c’est de mettre fin à ce cercle vicieux qui contraint la presse à s’épuiser dans une course en avant, pour survivre à des chocs extérieurs de coûts, de concurrence, de changements sociétaux dont elle n’a pas la maîtrise ou dont elle a perdu le contrôle.
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Ma conviction est qu’il n’y a pas de fatalité.
Pas de fatalité à ce que les coûts d’impression et de diffusion de la presse soient parmi les plus élevés du monde, et nos journaux parmi les plus chers.
Pas de fatalité à ce que notre presse soit la moins bien distribuée et à ce que les quotidiens arrivent chez les lecteurs quand ceux-ci sont déjà au travail.
Pas de fatalité à ce qu’il soit impensable de créer en France de nouveaux quotidiens, même si j’ai noté, comme vous tous, de récentes annonces en la matière. Voilà la première atteinte au pluralisme et à la libre communication des idées et des opinions.
Pas de fatalité à la baisse de la diffusion, alors que la diffusion augmente en Italie, en Suède, au Danemark, tout comme celle des gratuits, du Parisien - Aujourd’hui en France, des Echos, ou encore de La Croix. La réalité, c’est qu’il existe encore une demande lorsque l’offre répond aux attentes et qu’elle est bien distribuée.
Pas de fatalité à la sous-capitalisation des groupes de presse, pour peu qu’un journal soit une activité rentable. Pas de fatalité à la faiblesse de la présence française parmi les groupes multimédias mondiaux, pour peu de permettre d’abord à des groupes français de se constituer en France. Qu’il soit sur papier ou sur Internet, je crois dans l’avenir de l’écrit car, plus que jamais dans le monde complexe qui est le nôtre, je crois dans la nécessité de l’analyse et de l’investigation.
Je crois dans l’avenir de la presse payante car je crois dans la valeur de l’information vérifiée,analysée, triée, hiérarchisée. Je n’oppose pas la presse gratuite et la presse payante. Si la presse gratuite a des annonceurs, c’est qu’elle a un public. Et si elle a un public, c’est qu’elle répond à un besoin. Mais je ne crois pas qu’il arrivera un jour où plus personne ne sera prêt à payer pour de l’analyse et de l’investigation. Je ne crois pas qu’il arrivera un jour où plus personne ne sera d’accord pour acheter chaque matin un journal, parce qu’en plus de l’info, on achète une culture, une histoire, une maquette, des références, des habitudes, des auteurs, des choix éditoriaux et plus que tout, peut être,une vision, des engagements, des audaces, un talent.
C’est une folie de croire que la publicité financera un jour toute l’information : la gratuité, c’est une vue de l’esprit et la mort de la presse écrite.
Je crois enfin dans l’avenir du papier. Je sais bien que les jeunes générations grandissent dans et avec l’univers numérique. Je sais que des expériences sont en cours pour mettre au point des lecteurs de journaux numériques, à mi-chemin entre l’ordinateur et le téléphone portable, qui concilient le confort du papier et l’accessibilité du numérique. Ce « papier électronique » constitue d’ailleurs un créneau prometteur de nouvelles et vraies recettes pour la presse, à la différence d’Internet qui peine à imposer un modèle payant.
Mais je ne crois pas dans le basculement brutal, irrémédiable, et encore moins total de la presse imprimée vers l’univers numérique. Je crois plutôt dans leur complémentarité.
Ce qui est sûr, c’est que face aux incertitudes de l’avenir, face à l’impossibilité de prédire l’évolution des habitudes de lecture, le rôle de la puissance publique est de créer les conditions pour que votre environnement professionnel soit sain ; pour que vos équilibres économiques soient préservés ; pour que vous puissiez saisir toutes les opportunités d’une société plus que jamais avide de savoir, de culture et d’information ; pour que votre activité puisse en permanence s’adapter sans contrainte et sans frein ; pour que l’innovation soit possible et encouragée.
L’essentiel n’est pas de protéger le support, il est de protéger « la marque ». Il n’est pas de protéger le papier, il est de protéger l’écrit.




Je veux le dire avec clarté : les aides à la presse font naturellement partie du champ de réflexion des Etats généraux. Avec l’ensemble des professionnels, l’Etat doit s’interroger sur leurs objectifs et leur efficacité ; il doit réfléchir à la question du saupoudrage et se demander si les aides vont bien où elles doivent aller.
Mais, si l’Etat est prêt à prendre ses responsabilités pour mieux aider la presse dans ses mutations, la sortie des Etas généraux ne saurait se limiter à une réallocation ou à une augmentation des aides sans aucun changement d’ordre structurel. La presse a besoin d’aides, c’est un fait. Mais elle a aussi besoin d’un contexte économique clarifié. Faute de quoi nous apporterions les mêmes solutions aux mêmes questions.

Pour organiser les travaux, j’ai demandé à quatre personnalités respectées, indépendantes, ayant toutes une grande expérience du monde de la presse, de bien vouloir présider quatre pôles de débats et de propositions, quatre groupes de travail, qui formeront ensemble les Etats généraux de la presse.
Bruno Frappat, grand journaliste et éditorialiste, passé par le Dauphiné Libéré, Le Monde et La Croix,et actuellement président du groupe Bayard, présidera le groupe de travail chargé de réfléchir à l’avenir des métiers du journalisme.
Je crois déterminant de consacrer tout un champ de la réflexion à cette question et au rôle de l’écrit dans la société à venir. Car la crise de la presse est d’abord une crise du journalisme.
Ce groupe sera chargé de réfléchir, notamment, à la formation initiale et continue, à la responsabilité, aux droits et devoirs des rédactions, à la confiance des lecteurs, au statut et à la déontologie des journalistes, à leur rémunération et à leurs droits d’auteurs.
Je veux le dire clairement là aussi : à l’époque où il était si facile de flatter les jeunes en fermant les yeux sur le téléchargement illégal, je me suis battu pour défendre le droit d’auteur des artistes et des producteurs. Aujourd’hui je me battrai pour affirmer que le droit d’auteur est un principe essentiel,mais qu’il est irréel qu’au sein d’un même titre, on ne puisse éditer le même article sur plusieurs supports sans devoir le payer plusieurs fois.
Et puis je veux dire à la presse qu’elle doit réfléchir à certaines de ses pratiques. Outreau, l’affaire Baudis, ce sont des réalités. Vous avez tout à gagner en osant en parler.
Je remercie Bruno Frappat d’avoir accepté de prendre en charge cette réflexion sensible. Je sais que les journalistes, dans leur diversité, mais aussi face aux interrogations majeures que leur pose l’avenir de leur métier, lui font confiance pour créer une dynamique d’espoir, d’honnêteté, de liberté et de responsabilité.
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Arnaud de Puyfontaine, ancien directeur délégué au Figaro, devenu par la suite président d’Emap et de Mondadori France, et ancien président de l’association pour la promotion de la presse magazine(APPM), présidera un pôle dédié au processus industriel de la presse.
Oui, la presse écrite est une industrie. Imprimer, transporter, distribuer, prospecter, la presse écrite est une logistique extrêmement sophistiquée au service d’un produit extrêmement fragile et périssable : le journal.
Ce chantier est d’autant plus capital qu’il est le lieu de tous les fatalismes, fatalisme de l’impression, fatalisme de la distribution, alors que des progrès concrets peuvent être obtenus pour peu qu’ils soient décidés.
Comme beaucoup d’entre vous, je pense que la distribution est le premier problème de la presse papier. A l’heure où le marketing est devenu si important, il est quand même singulier que la pressesoit aussi mal vendue ! Que le métier de vendeur de journaux soit parmi les plus ingrats et les moins bien rémunérés ! Qu’un diffuseur passe davantage de temps à déplacer des invendus qu’à connaître sa clientèle et améliorer son offre ! Que trouver un journal le samedi, le dimanche ou en vacances, chez un buraliste ou dans un supermarché, relève de l’exploit ! Et qu’à l’étranger, la presse française soit introuvable !




Je m’interroge sur la portée de l’article 1er de la loi Bichet, selon lequel « la diffusion de la presse imprimée et libre », quand cette loi n’offre en réalité aucune flexibilité ?
Il ne s’agit pas de jeter le bébé avec l’eau du bain, d’oublier que la mutualisation de la distribution permet d’en réduire les coûts et d’assurer une diffusion pluraliste de la presse. Il s’agit de prendre la mesure des archaïsmes de notre système et des inconvénients dramatiques qui en résultent.
Les NMPP ont entrepris un plan de modernisation permettant d’augmenter le nombre de diffuseurs et d’améliorer l’attractivité du métier. Je connais la sensibilité des négociations en cours. Mais nous devons aller plus vite, plus loin, plus fort.
De même, la distribution de la presse par la Poste a fait l’objet récemment de nouvelles négociations.
Je sais l’importance des efforts consentis de la part de tous les acteurs. Mais il faut développer fortement le portage, qui constitue une piste prioritaire pour la distribution de la presse quotidienne et une importante source d’emplois. Les quotidiens régionaux ont très largement montré l’exemple.
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Le numérique suscite beaucoup d’espoir. Il est une presse nouvelle à inventer et offre tant
d’opportunités à saisir.
Mais le numérique présente aussi beaucoup de menaces : la fragmentation et l’évolution des usages, la pression de la gratuité, le respect incertain de la propriété intellectuelle, le risque de relâchement de la qualité de l’information, la mutation du marché publicitaire qui se porte en priorité, et dans les proportions très élevées, sur quelques sites mondialement connus, mais jamais français.
La presse numérique n’a pas encore trouvé son modèle économique, c’est un fait. Elle est pourtant une ligne d’horizon pour une bonne partie de la presse. Cet enjeu majeur sera traité par Bruno Patino, nouveau directeur de France Culture et ancien vice-président du directoire du groupe Le Monde, ancien président du Monde Interactif et de Télérama, dont la réflexion sur ce sujet est visionnaire et reconnue.
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Enfin, François Dufour, journaliste, rédacteur en chef de trois quotidiens pour enfants, co-fondateur du groupe Play Bac, qui a su créer et développer des concepts nouveaux sur support papier, et qui représente la presse quotidienne nationale à l’Association mondiale des journaux, sera chargé de traiter les questions relatives aux rapports entre la presse et la société.
Quel est le rôle de la presse dans une démocratie contemporaine et comment le conforter ? Quelles sont les attentes du lectorat et comment retrouver sa confiance ? Comment moderniser l’offre éditoriale ? Comment ramener les jeunes vers la lecture des quotidiens ? Comment garantir le pluralisme, l’indépendance, la coexistence d’entreprises de presse de toutes tailles ? Quels sont les obstacles à la constitution de grands groupes français de presse et multimédia ?
L’industrie des médias, la culture, la création, seront parmi les plus grands facteurs de richesse et d’emploi dans les années à venir. Il n’y a aucune raison que des groupes étrangers viennent investir chez nous et qu’aucun groupe français, ou si peu, n’investisse en France, ni à l’étranger.
Cette question n’est pas taboue, pas plus que ne l’est celle de la concentration croissante de la presse régionale, ni celle des droits et devoirs des rédactions. Elle n’est pas dissociable, et pas davantage incompatible avec celle de la protection du pluralisme et de la presse d’opinion, dans un contexte où le nombre de supports s’est considérablement développé.
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Avec ces quatre personnalités, les Etats généraux sont entre de bonnes mains, j’en suis certain. Je ne peux que les remercier, et ceux qui viendront les aider, d’avoir accepté ma proposition. Ils se réuniront fréquemment dans le cadre d’un comité de pilotage dont la coordination sera assurée par Bernard Spitz, mon cabinet, la ministre de la culture et la direction du développement des médias.
J’ai demandé à ces quatre personnalités de procéder à de très larges consultations et de constituer des groupes de travail représentatifs de l’ensemble de la profession. Ils me feront à cet effet des propositions dans les prochains jours, qui tiendront compte de vos suggestions.
Un site Internet, relayé je l’espère par vos propres sites, ainsi que des journées publiques de débat sont prévus.
Je souhaite que les lecteurs, les consommateurs, les citoyens soient associés aux Etats généraux. Il ne s’agit pas pour la presse de ne parler qu’aux professionnels de la presse.
De même, j’ai proposé que les écoles de journalisme qui le souhaiteraient, en lien, le cas échéant, avec des écoles de gestion, participent aux travaux et je les remercie pour l’accueil favorable qu’elles ont réservé à cette proposition.
Enfin, il me paraît essentiel de nous documenter sur le secteur de la presse dans les pays qui nous sont comparables, d’apprendre de leurs succès, comme de leurs échecs, en gardant bien sûr notre lucidité sur les spécificités de notre système et notre liberté de pouvoir les préserver.
Les Etats généraux de la presse ne doivent pas être un simulacre de concertation. Face à l’ampleur des enjeux, je crois en la force de la discussion. J’écouterai et je tiendrai compte de ce qui sera dit. Mon exigence est que les sujets difficiles ne soient pas, une fois encore, esquivés.
Nous n’avons pas le droit d’échouer. Tous les sujets sont sur la table, les plus techniques – les aides de l’Etat, les annonces judiciaires et légales, le régime du mécénat, le partage de la valeur dans la chaîne de distribution, le portage – comme les plus sensibles l’indépendance, le pluralisme, la crédibilité, la loi Bichet, l’avenir des ouvriers du Livre…
Je souhaite qu’une discussion franche aboutisse à des décisions ambitieuses, qui ne se résument pas au plus petit dénominateur commun, qui ne pourrait être que celui des aides de l’Etat. Mon objectif, je le redis, est que nous dégagions des solutions partagées. Pour cela, chacun doit s’engager.
Ce n’est pas seulement l’avenir des éditeurs qui est en cause. C’est celui de toute la profession, les journalistes, les imprimeurs, les rotativistes, les dépositaires, les diffuseurs…
D’ici deux mois, nous ferons un premier bilan d’avancement du processus. Mon souhait est de pouvoir alors rapidement, avec vous, engager les réformes nécessaires, législatives, réglementaires, fiscales et financières annonciatrices d’espoir et de changement.
J’en appelle à la responsabilité de chacun d’entre vous. J’en appelle à votre amour du métier, à votre amour de la presse, à votre amour de la démocratie. La presse doit réussir son adaptation au monde du XXIème siècle. Nous devons être, nous serons, à la hauteur de ce défi. J’en suis persuadé.